mardi 24 septembre 2024

Le Notre Père du prisonnier (3 - Que ton Nom soit sanctifié...)

Je poursuis la publication de courtes prédications, offertes aux détenus.e.s des prisons à Genève, sur chacune des paroles du Notre Père, dans l’Évangile selon Matthieu (6, 9-13).

Pour ceux qui l’ignorerait, les conditions de l'organisation des célébrations dans les prisons limitent la durée de leur déroulement. Et je n'ai que 5 minutes (avec sa traduction anglaise) pour partager une prédication avec les détenus.

Le titre de ces articles me vient d'une prière du Frère Dominicain Philippe Maillard: Le Notre Père du prisonnier (ou la prière des sans voix). Aujourd'hui décédé, il fut très engagé auprès des personnes en situation de précarité.

Il a laissé une magnifique paraphrase du Notre Père que j'ai également publié dans un article précédent. 

Mais pour le moment...   

"Notre Père ... , que ton Nom soit sanctifié." (9)

"Le dieu inconnu" était une divinité vénérée par les grecs anciens. En plus des dieux principaux de l’Olympe, ils reconnaissaient l’existence d’innombrables divinités mineures. Pour ne pas risquer d’en ignorer une, ils ont choisi de confesser leur ignorance en inscrivant sur un Autel d’Athènes cette dédicace : "A un dieu inconnu."


Le livre des Actes rapportent la tentative de l’apôtre Paul d’attribuer cette dédicace au Dieu créateur qu’il venait annoncer aux athéniens. La chose ne se passait pas trop mal, jusqu’au moment où Paul parla de la résurrection à venir… avec l’échec ou la demi-réussite que l’on sait.

 

"A un dieu inconnu" ? La Bible nous présente un dieu qui se fait connaître, en particulier à Moïse, dans le livre de l’Exode.  À sa demande, Moïse reçoit même son Nom, que l’on peut traduire : "Je suis qui je suis (ou qui je serai)." Ainsi, quelle que soit la particularité de la traduction, ce nom dit clairement L'ÊTRE de Dieu…

 

Et quand Jésus, dans cette prière le nomme "PÈRE", il nous invite à entrer dans une relation authentique et confiante avec une personne qui EST. Sa prière est plus qu’un texte à répéter : elle est une inspiration, elle insuffle en nous la liberté de s’adresser à Dieu "Notre Père", sans peur, sans honte, sans feinte.

 

« Notre Père qui est aux cieux, que ton NOM soit SANCTIFIE »

 

Dans la littérature biblique, le Nom désigne respectueusement la personne de Dieu. Mais avec quel autre mot pourrait-on nommer notre respect pour le Nom de Dieu ? (Échanges avec les détenu.e.s) :  « sanctifier », « honorer », « respecter », « célébrer » ... Ces mots, que nous avons choisis ensemble, disent ce que nous désirons vivre en présence de Notre Père. La sainteté de Dieu est appréciée à sa juste valeur lorsque nous expérimentons ces bienfaits dans notre vie.

 

"Saint" signifie qui appartient à Dieu seul ! "Saint" est une manière de dire que Dieu existe par lui-même, il n’est dépendant de rien ni personne. On ne peut ajouter quoi que ce soit à la personne de Dieu, à l’existence de Dieu. Dieu n’est donc pas notre propriété.  Sanctifier Dieu, c’est accepter que ce que je sais de lui est limité. D’autres, différents de moi, peuvent aussi sanctifier Dieu.

 

Une petit anecdote à ce sujet : un moine chrétien (Christian de Chergé), qui pratiquait un dialogue intense avec des croyants musulmans, utilisait une image pour en parler. Il disait : "Nous construisons ensemble notre puits" (sous-entendu, nous sommes en quête de Dieu ensemble, avec nos différences). 

 

Un jour, en plaisantant, il dit à son interlocuteur : "A ton avis, au fond de notre puits, qu’allons-nous trouver ? De l’eau musulmane ou de l’eau chrétienne ?" Son ami lui répondit alors : "Je pense que, au fond de ce puits, nous trouverons tout simplement de l’eau de Dieu !"

 

Je crois que la foi en Dieu est une quête constante de la connaissance de Dieu, dans la relation avec autrui. Un philosophe a écrit: "Si Dieu est quelques part, c'est dans le visage de l'autre."  

 

Ainsi, lorsque de la violence est commise au nom de Dieu, il n’est pas sanctifié c’est certain ! Faire mourir quelqu’un parce qu’il ne croit pas comme moi, c’est prendre le risque de mettre à mort une expression de la sainteté de Dieu !

Et nous, accepterons-nous de sanctifier le Nom de Dieu ? Accepterons-nous de vivre avec confiance et authenticité auprès de "Notre Père" ? Consentirons-nous à notre fragilité pour découvrir notre sainteté ?  

Lorsque nous prions "... que ton nom soit sanctifié" :

 

… nous disons que Dieu est saint, qu’il est aussi unique et différent que tout ce qui existe dans cette création.

 

… nous disons que Dieu est proche dans l’histoire du monde comme dans notre vie quotidienne et que nous attendons avec confiance que son œuvre arrive à son but.

 

… nous disons que nous reconnaissons en Dieu notre Père et que nous souhaitons l'honorer et le respecter.

 

… nous disons enfin que nous avons confiance que ce que nous entreprenons pour lui et avec lui n’est pas vain, malgré nos limites et nos imperfections.

 

Le pasteur Philippe Zeissig notait, avec autant de clarté que de finesse : "Sanctifier le nom de Dieu, c’est l’accueillir dans notre vie comme le Soleil est accueilli dans le Ciel. C’est laisser ce Nom irradier notre être intérieur ; c’est en tirer notre inspiration et notre paix."

 

"Ainsi soit-il" pour nous , ensemble, aujourd'hui et toujours.




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