dimanche 18 août 2024

Je suis le pain qui descend du ciel...

 Donne-nous aujourd’hui notre pain de ce jour (Mt 6,11). Ces mots, nous les dirons tout à l’heure, comme nous en avons l’habitude dans la prière du Notre Père. Mais à quoi pensons-nous en exprimant cette demande ? Quel « pain de ce jour » demandons-nous  ?

Je vous invite à regarder l’image qui se trouve sur votre feuillet… Un beau pain, bien cuit qui a l’air délicieux et croustillant… Un aliment simple, qui pourtant accompagne tant de menus dans notre vie quotidienne. Et qui est lié à tant de souvenirs… ?

Pour moi, je pense au goûter de mon enfance : une tranche de pain et une barre de chocolat . Ou encore, après une randonnée, ce moment de réconfort avec du pain et du fromage… Et vous, quels sont vos souvenirs de pain ?

Il y a encore ces expressions qui accompagnent les temps de notre vie : manger son pain blanc – ou noir (Selon que les circonstances sont bonnes ou mauvaises). C’est du pain béni ! (Lorsqu’une une situation nous remplit de joie et de gratitude) Ou encore, manger le pain de l’affliction ( Un pain de douleur, qui s’inspire de celui de la Pâques, dans le livre de l’Exode… Un pain de liberté et de souffrance aussi).

Autant d’expressions qui font écho à la richesse et l’ambivalence de ce texte sur le pain que nous lisons. Ce chapitre de Jean nous emmène de la joie des pains multipliés à la confession de Pierre qui reconnait en Jésus « le Saint de Dieu… qui a les paroles de la vie éternelle. » (69). Mais ce chapitre dit aussi l’incrédulité de ses proches quant à l’identité de Jésus (42) et l’amertume du Maître abandonné de certains disciples qui ont jugés ses paroles « dures et inécoutable. » (60)

Alors la question demeure : Quel « pain de ce jour » demandes-tu ? A quel pain communies-tu ? Quel pain partages-tu ?

Prédication offerte à la communauté paroissiale de Belmont-Lutry. Textes du jour: 1 Rois 19,2-8; 1ere lettre aux Corinthiens 10,1-6.11-12; Evangile: Jean 6,41-51.


« Je suis le pain qui descend du ciel »  (41)

Ces mots, Jésus les a dits plus haut, et c’est dans un murmure que celles et ceux qui le connaisse comme « le fils de Joseph… » s’en étonnent, voir s’indignent : comment peut-il déclarer maintenant : Je suis descendu du ciel ? » (42) Comment cet homme ordinaire pourrait-il venir du ciel ?

Le pain quotidien des humains nous pose bien des questions difficiles lorsqu’il vient à manquer chez les uns et qu’il abonde chez les autres … Et le pain qui vient du ciel ? Eh bien lui aussi, il occasionne autant d’appétit que de perplexité !

La vérité sur la personne de Jésus ne va pas de soi. Comment admettre que « le Verbe (qui) s’est fait chair (vient) habiter parmi nous. ? (1,14) Qu’il est là en cet instant ? Peut-être que leur perplexité nous ramène à la nôtre, à nos propres résistances à voir en Jésus ce qu’il affirme être ?

Un pain qui ne vient pas de l’humain, mais de Dieu ? Quelle est donc cette nourriture qui fit marcher Elie, épuisé, découragé, quarante jours et quarante nuits jusqu'à la montagne de Dieu, » ? N’était-elle qu’un fortifiant, ou faudrait-il dire un anti-dépresseur puissant ? Ce repas déposer par l’ange, assurément, venait d’ailleurs, de plus loin, de plus haut.

Et je pense que ce repas ne lui donna pas qu’une force physique pour marcher si longtemps et si loin. Cette nourriture spirituelle le prépara surtout à la révélation de l’Horeb… A savoir, entendre « le bruissement d’un souffle ténu » (1 R 10,13), la présence du Seigneur.

Le pain de Dieu, que Jésus nous offre ici, nous est nécessaire à Elie comme à nous, même fragile, même mince… Car pour Elie comme pour nous, sans le pain du Christ, « le chemin sera (toujours) trop long » (1 R 10,9).


Jésus l’affirme : son pain ne nous laissera pas mourir (48-49). Mais la saveur de ce pain peut être amère… la mort des pères dans le désert est rappelée par Jésus (49), comme la lettre aux Corinthiens que nous avons lu le développe : tous ont vécu les mêmes signes, le même baptême, ont goûter à la même source spirituelle, car, nous dit le texte : « ils buvaient à un rocher spirituel qui les suivait : ce rocher, c'était le Christ. » (1 Co 10,4)  

Alors pourquoi cette rude conclusion : « …leurs cadavres jonchèrent le désert » (5), pourquoi parler de mort, si le pain du Christ donne la vie ? C’est que nous sommes amenés ici à entendre la dimension controversée de la foi au Christ. Cette mort, dont ils parlent, n’est pas physique mais spirituelle. Car pour vivre du pain du Christ, il s’agit d’en reconnaitre le sens et la valeur : « Être instruit par Dieu » (45)

Jésus renvoie à la promesse du prophète Esaïe d’une génération qui sera pleinement instruite de Dieu, « Tous (ses) enfants seront disciples du Seigneur » (Es 54,13) ; Et le prophète Jérémie de renchérir : il ne sera plus nécessaire de répéter « Apprenez à connaître le Seigneur, car ils me connaîtront tous, petits et grands. » (Jr 31,34) parce que la loi de Dieu ne sera plus seulement sur leurs lèvres mais dans leur cœur ! (Jr 31,33)

Ainsi, vivre du pain du Christ, manger sa  « chair, donnée pour que le monde ait la vie » (51) ne devrait pas nous étonner outre mesure… A mon sens, recevoir et manger la chair du Christ, ce n’est pas manger un corps… Mais c’est se nourrir de son incarnation ! C’est se nourrir de sa parole, de ses gestes… C’est être imprégné de sa personne… C’est rependre autour de nous cette agréable odeur de pain fraîchement cuit, que l’on hume avec plaisir… Une agréable odeur de joie, de miséricorde et d’amour.


Il y aurait encore bien des choses à dire sur le pain de Dieu… J’aimerais dire en conclusion, simplement, que le pain de Dieu est pétri de grâce et de sagesse. Dans le sermon sur la montagne, Jésus nous le laisse entendre : « En effet, quiconque demande reçoit, qui cherche trouve, à qui frappe on ouvrira. Qui d'entre vous, si son fils lui demande du pain, lui donnera une pierre ? (…) Si donc vous, qui êtes mauvais, savez donner de bonnes choses à vos enfants, combien plus votre Père qui est aux cieux donnera-t-il de bonnes choses à ceux qui le lui demandent. »( Mt 7,8-11)

Oserais-je le dire ainsi : la boulangerie du Seigneur est toujours ouverte et jamais en rupture de stock !





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