En
désignant l’illustration proposée sur un feuillet à l’assemblée – Votre
illustration sur le blog) :
« Jésus leva les yeux au ciel
et dit : « Père, l’heure est venue… » (1). Sur le seuil de sa Passion, Jésus prie. Les
Evangiles présentent Jésus en prière, « dans la montagne, à
l’écart », mais ne disent rien du contenu de sa prière (Mt 14,23 ; //
Mc 6,46). Il faudra une demande des disciples à être enseigné à prier, pour que
Jésus y réponde avec le Notre Père (Lc 11,2-4).
Les mots de Jésus en
prière, nous les entendons encore dans le jardin de Gethsémané (Mt 26,39), la
plus courte sans doute, dans une supplication de quelques mots. Et ici, la plus
développée, dans le chapitre 17 de l’Evangile selon Jean, qu’elle occupe
entièrement.
Prédication offerte à l'assemblée paroissiale de Bourg-en-Lavaux. Texte du jour: La prière de Jésus en Jean 17.
Cette prière d’adieu (comme on a pu la nommer) conclut les derniers
entretiens de Jésus avec ses disciples (13 – 17). Des entretiens dans lesquels
Jésus se révèle de manière plus intime qu’en public : « Je ne vous appelle plus serviteurs, (leur dira-t-il)…
Je vous appelle amis, parce que tout ce
que j’ai entendu auprès de mon Père, je vous l’ai fait connaître. » (15,15).
Mais n’est-ce qu’une
prière d’adieu ? Dans la peinture d’Arcabas sur votre feuillet, je vois
Jésus, les yeux fermés. Rassemblé à l’intérieur de son être, il parle à son
Père. La douceur de son visage ne doit pas faire oublier sa détermination à prendre
soin de ses disciples.
Mais encore, Jésus, derrière
ses yeux clos, contemple aussi son avenir, dans la communauté des croyants qui
viendront après lui – et dont nous faisons partie aujourd’hui. Ces yeux fermés et
se mains levées de Jésus en prière ouvre les nôtres sur les intentions et les
précautions qu’il a adressé au Père et qui sont nécessaires à notre vie de foi,
aujourd’hui encore.
Jésus nous offre ici, au
plus profond de son être, pour notre génération, une prière de confiance,
d’amour et d’unité.
Dans l’extrait que nous lisons
ce matin, les expressions « je ne suis
plus dans le monde », « j’étais avec eux », « je vais à
toi » disent clairement que
l’avenir des disciples dans le monde se fera sans sa présence, telle que ses
disciples ont connu. Et le monde qui les attend promet de ne pas être tendre
avec eux (14-15)… Et d’ailleurs, l’est-il avec nous ?
Par ses mains ouvertes,
confiantes autant que suppliantes, face à l’hostilité du monde, Jésus demande à
Dieu de nous en garder. Mais cette protection ne sera pas celle du confort
douillet ni de la facilité.
Elle sera celle de l’assurance
de ne pas périr par le Mauvais… Et pas la peine de chercher le diable pour
savoir de quoi l’on parle. L’actualité de notre monde ne nous donne-t-elle pas
des exemples, aussi nombreux que douloureux, de ce qui pourrait nous détruire physiquement !
Notre paix, notre
confiance, elle, vient que cette protection a sa source dans notre appartenance
au Christ : elle n’empêche pas la difficulté ou la détresse, mais elle
suscite notre courage comme notre consolation par cette réalité : nous
sommes pas du monde, mais de son univers à lui, de son Royaume à lui !
Alors protégés – oui,
certes – mais pas « chouchouté » pour autant ! Si Jésus est
Fils, il n’est pas un fils à papa – et nous non plus ! Comme le Christ a
été exposé à l’hostilité du monde, nous le sommes aussi (15). Un disciple n’est
pas plus grand que son maître… mais la protection du disciple n’est pas moindre
que celle du maître ! « En ce monde
vous êtes dans la détresse, mais prenez courage, j’ai vaincu le monde. »
(Jn16,33)
La conclusion de notre
extrait parle d’un envoi des disciples dans le monde soutenu par la consécration
du Christ. Ainsi, la consécration précéderait-elle la mission ? Pas
nécessairement… Je me rappelle ces mots de l’Abbé Pierre : « Il ne
faut pas attendre d’être parfait pour commencer quelque chose de bien. »
Mais tout de même, pour
reprendre des mots de cet Evangile, Jésus envoie en mission des disciples et
non des mercenaires. L’authenticité de notre consécration ne fait-elle pas
celle de notre témoignage ? Si nous ne sommes pas à l’origine de notre
mission, ne sommes-nous pas responsables de sa réalisation ?
Et pour la réaliser,
quelle est notre ressource ? Ce visage paisible du Christ, peint par
Arcabas, me donne à voir la source de la consécration du Christ : sa
confiance en son Père.
C’est ainsi que la
consécration de Jésus est la source de la nôtre. Et où la trouver mieux que
dans sa Parole? La Parole du Christ, ce ne sont pas que des mots… mais des
gestes, des attitudes, des attentions portées à autrui. Bref, la parole du
Christ, dans les Evangiles, cela ressemble à des rencontres dans la
vérité.
Et si cette parole est dite
vérité, elle n’est pas pour autant un enfermement dans la peur, un esclavage
d’exigences inatteignables, de contraintes sans fin ! « Vous connaitrez la vérité, et la vérité fera
de vous des êtres libres. » (8,32). Une vérité simple, étonnante et intense, comme les traits et couleurs de
ce tableau.
« Vérité ? »
J’entends poindre la question : « Qu’est-ce
que la vérité ? » (18,38) Vous vous souvenez, je pense, que Jésus ne donnera aucune réponse à cette
question du gouverneur Ponce Pilate ?... Et pourtant, la vérité, elle se
tenait justement en face de lui !
« Et
pour eux, je me consacre moi-même. » (19). Ces mots de Jésus semblent sortis de cette
représentation du Christ. Quelle joie – et non quelle crainte – se donne à nous
dans les mots de Jésus ! Jésus, le Christ, inspirant notre vie, fécondant
nos pensées, soutenant nos actes… pour nous rendre non pas esclaves, mais
libres !
Libres d’entreprendre, de
chercher, de se tromper… Libres parce que la loi de Dieu est « au
fond de nous-mêmes », selon la promesse de Jérémie, dans notre être
profond ! La promesse réalisée en Christ d’une alliance de vérité selon le
cœur de Dieu !
Libres de servir et
d’aimer notre prochain, comme nous l’y invite la première épitre de Jean : rendre
l’amour de Dieu « visible » dans notre amour concret pour autrui.
Et une fois encore, à
l’image du Christ, cet amour ne sera pas fait que des mots, mais des actions,
aussi généreuses que coûteuses, aussi déraisonnables, parfois, que
nécessaires !
« Mes enfants, (dit encore Jean dans sa lettre)… n’aimons pas seulement en paroles, avec de beaux
discours ; faisons preuve d’un véritable amour qui se manifeste par des
actes. » (1 Jn 3,18). Et
l’apôtre Paul conclura :
« … vous accomplirez ainsi la loi du Christ. » (Ga 6 ,2)
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